Le recentrage pornographique (XIXème siècle).

Apparu sous la plume de Restif de la Bretonne, en 1769 (!), le terme de “pornographie” est composé des deux mots grecs “graphein” et “porneia”.
“Graphein” est un verbe à entendre au sens large de “tracer”, caractéristique première de tous les arts (par ex., la “photographie” trace la lumière). “Porneia” est un nom signifiant “prostitution” en un sens bien précis : au-delà du sens étymologique (‘prostituere’ = ‘exposer publiquement’) -traduit par Baudelaire dans ses Fusées par la phrase “Qu’est-ce que l’Art ? Prostitution !”-, “porneia” désigne l’exposition du corps féminin dans les maisons closes (‘porneion’), davantage que l’exposition publique des courtisanes (‘hetairai’). Ainsi, la pornographie trace la prostitution des ‘pornai’ (prostituées de maisons closes) comme mise-en-oeuvre publique de l’obscène (‘ob-scenus’, c’est ce qui est hors-scène, échappant au regard traditionnel). Mais rappelons aussi, premièrement que ‘porneia’ est traduit bibliquement par ‘culte de la luxure et des idoles’, et deuxièmement, que le nom sous-entend l’échange monétarisé du corps féminin contre la richesse symbolique de l’homme (traduction du terme grec ‘pernemi’). Donc, le recentrage pornographique dans lequel Zola et les Goncourt, passionnés d’histoire et éminents critiques d’art, se situent est la dynamique moderne -initiée par le réalisme et le naturalisme- qui consiste à mettre en oeuvre l’obscénité mythologique de la prostitution comme symbole de la présentation publique propre à la quotidienneté moderne de la féminité.


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